civilisation pharaonique: archéologie, philologie et histoire

Événement, récit, histoire officielle.
L’écriture de l’histoire dans les monarchies antiques

colloque au Collège de France 24 et 25 juin 2002

Événement, récit, histoire officielle. L’écriture de l’histoire dans les monarchies antiques

La chaire de civilisation pharaonique pilote, depuis son renouvellement, un groupe de recherche consacré à l’historiographie égyptienne. La préparation d’une édition scientifique des annales de Thoutmosis III, dont la traduction et le commentaire sont proposés dès cette année en séminaire, en est une première manifestation. Ce travail se prolonge nécessairement par une nouvelle réflexion sur le genre annalistique, l’histoire officielle et les mécanismes de l’historiographie en Égypte ancienne, qui met en perspective l’ensemble des sources, du IIIe millénaire à la Basse Époque. La documentation a, en effet, été considérablement renouvelée ces dix dernières années, grâce à la découverte et à la publication de monuments qui comblent d’importants vides chronologiques: annales de la vie dynastie, de Téti à Mérenrê (vers 2300-2250 av. J.-C.), de la xiie dynastie (Amenemhatii, vers 1914-1879) et de la xxiie dynastie (Pami et sans doute Chechonk III et V, vers 837-736).
L'étude de ces textes et leur mise en perspective nécessite un cadre conceptuel et une méthodologie qui, trop tributaire des concepts forgés par la perception de l’histoire qui nous est propre, restent encore à préciser ou à définir. Les concepts d’événement, d’histoire, d’historiographie, d’écriture historiographique sont extrêmement mouvants d’une étude à l’autre; il paraît donc souhaitable de rassembler les spécialistes des périodes anciennes intéressés à ces questions, afin qu’ils estiment les besoins, élaborent les définitions appropriées et proposent des pistes de recherche, nourries par les données propres à chaque période et à chaque ensemble géographique. Ce travail doit aboutir à un inventaire des traits communs de l’historiographie antique et de leur évolution, mais aussi à une liste des éléments divergents. Outre qu’ils permettront de mieux saisir les particularismes locaux, c’est-à-dire les traits originaux de l’histoire officielle de chaque civilisation, ces éléments sont susceptibles de soulever, par leur présence ou leur absence, des questions inédites dans les diverses disciplines.

À titre préliminaire, les problématiques que l’on peut envisager sont les suivantes:

1. Qu’est-ce qu’un événement selon les critères de l’histoire officielle? Les premiers modes de datation fonctionnent selon un système d’années éponymes, qui permettent d’analyser le type d’événement retenu, et l’évolution des choix en ce domaine. En dehors de cette fonction, quelles catégories d’événements l’histoire officielle retient-elle? Quelle est la terminologie antique qui recouvre cette notion?

2. Quelle est la fonction de l’événement? Système de repère dans le temps (chronographie), point de fixation de la mémoire culturelle (question de la «réalité» de l’événement célébré ou de la réactualisation d’un archétype), commémoration, mobilisation à des fins politiques, etc. Quelles évolutions peut-on constater en ce domaine?

3. Comment l’événement est-il transcrit? Question des formes de la mise par écrit, des notices techniques les plus concises aux formes narratives les plus poussées, y compris poétiques/épiques. Examen des formats et des supports, et du lien qu’ils entretiennent avec le contenu. Quels genres peuvent-ils être définis? Quels sont les procédés d’expression historiographique à l’œuvre dans les genres littéraires non historiques, s’il y en a?

4. À quel degré s’agit-il d’une écriture «historienne»? Quels genres ou types de textes mobilisent-ils des témoignages pour ancrer les récits dans la vérité/véracité? Quels textes mettent en œuvre des éléments explicatifs ou établissent un récit de circonstances, et quel est le caractère de ces mises en perspective?

5. Comment l’histoire officielle se reproduit-elle dans les récits individuels? Les biographies de particuliers, les chroniques, intègrent-elles des éléments propres à l’historiographie officielle, selon quels procédés et à quel degré? Est-ce aussi un mode d’expression de l’historiographie officielle, dans un cadre moins rigide?
 
civilisation pharaonique: archeologie, philologie et histoire

evenement, recit, histoire officielle.
l'ecriture de l'histoire dans les monarchies antiques

colloque au college de france 24 et 25 juin 2002

evenement, recit, histoire officielle. l'ecriture de l'histoire dans les monarchies antiques

la chaire de civilisation pharaonique pilote, depuis son renouvellement, un groupe de recherche consacre a l'historiographie egyptienne. la preparation d'une edition scientifique des annales de thoutmosis iii, dont la traduction et le commentaire sont proposes des cette annee en seminaire, en est une premiere manifestation. ce travail se prolonge necessairement par une nouvelle reflexion sur le genre annalistique, l'histoire officielle et les mecanismes de l'historiographie en egypte ancienne, qui met en perspective l'ensemble des sources, du iiie millenaire a la basse epoque. la documentation a, en effet, ete considerablement renouvelee ces dix dernieres annees, grace a la decouverte et a la publication de monuments qui comblent d'importants vides chronologiques: annales de la vie dynastie, de teti a merenre (vers 2300-2250 av. j.-c.), de la xiie dynastie (amenemhatii, vers 1914-1879) et de la xxiie dynastie (pami et sans doute chechonk iii et v, vers 837-736).
l'etude de ces textes et leur mise en perspective necessite un cadre conceptuel et une methodologie qui, trop tributaire des concepts forges par la perception de l'histoire qui nous est propre, restent encore a preciser ou a definir. les concepts d'evenement, d'histoire, d'historiographie, d'ecriture historiographique sont extremement mouvants d'une etude a l'autre; il parait donc souhaitable de rassembler les specialistes des periodes anciennes interesses a ces questions, afin qu'ils estiment les besoins, elaborent les definitions appropriees et proposent des pistes de recherche, nourries par les donnees propres a chaque periode et a chaque ensemble geographique. ce travail doit aboutir a un inventaire des traits communs de l'historiographie antique et de leur evolution, mais aussi a une liste des elements divergents. outre qu'ils permettront de mieux saisir les particularismes locaux, c'est-a-dire les traits originaux de l'histoire officielle de chaque civilisation, ces elements sont susceptibles de soulever, par leur presence ou leur absence, des questions inedites dans les diverses disciplines.

a titre preliminaire, les problematiques que l'on peut envisager sont les suivantes:

1. qu'est-ce qu'un evenement selon les criteres de l'histoire officielle? les premiers modes de datation fonctionnent selon un systeme d'annees eponymes, qui permettent d'analyser le type d'evenement retenu, et l'evolution des choix en ce domaine. en dehors de cette fonction, quelles categories d'evenements l'histoire officielle retient-elle? quelle est la terminologie antique qui recouvre cette notion?

2. quelle est la fonction de l'evenement? systeme de repere dans le temps (chronographie), point de fixation de la memoire culturelle (question de la "realite" de l'evenement celebre ou de la reactualisation d'un archetype), commemoration, mobilisation a des fins politiques, etc. quelles evolutions peut-on constater en ce domaine?

3. comment l'evenement est-il transcrit? question des formes de la mise par ecrit, des notices techniques les plus concises aux formes narratives les plus poussees, y compris poetiques/epiques. examen des formats et des supports, et du lien qu'ils entretiennent avec le contenu. quels genres peuvent-ils etre definis? quels sont les procedes d'expression historiographique a l'oeuvre dans les genres litteraires non historiques, s'il y en a?

4. a quel degre s'agit-il d'une ecriture "historienne"? quels genres ou types de textes mobilisent-ils des temoignages pour ancrer les recits dans la verite/veracite? quels textes mettent en oeuvre des elements explicatifs ou etablissent un recit de circonstances, et quel est le caractere de ces mises en perspective?

5. comment l'histoire officielle se reproduit-elle dans les recits individuels? les biographies de particuliers, les chroniques, integrent-elles des elements propres a l'historiographie officielle, selon quels procedes et a quel degre? est-ce aussi un mode d'expression de l'historiographie officielle, dans un cadre moins rigide?